En forme de récit rapide, que devient la tête de Gorgo ?
Après la décapitation, Persée s’enfuit avec son trophée. Dans son périple, ici et là, il se sert de la tête pour pétrifier ses adversaires selon les trois modes évoqués précédemment.
Il l’aurait ensuite offerte à Athéna, à l’origine de ce qu’est Gorgo et de l’aide apportée à Persée. La déesse la fixe sur son bouclier avec l’aide d’Héphaistos .
Perséphone en aurait aussi disposé pour protéger l’entrée des Enfers de l’intrusion des vivants (Ulysse évoque sa crainte de la rencontrer quand il brave l’interdit pour questionner Tiresias, celui qui par sa double métamorphose, “connaît la vérité sur le sexe” ).
Ce sont deux versions différentes, sans relation explicite.
Le gorgoneion est l’image du visage circulaire de Gorgo, analogue à son reflet. En plus des boucliers des héros et des guerriers, il se déploie partout, sur tous les types d’objets et éléments d’architecture. Le motif disséminé permet une familiarité avec la mort qui ne peut se regarder en face.
Il est aussi rapporté que Persée, participant au lancer de disque pendant des jeux funèbres, tue involontairement Acrisios, son grand-père maternel, réalisant la prédiction de l’oracle.
Le disque, diskos, n’est pas seulement l’objet du discobole. Il ressemble à la pierre avec laquelle on écrase les grains – l’Odyssée parle de la farine “assassinée” par la meule.
“C’est un objet inquiétant, puisqu’ il arrive parfois que des individus se trouvent sur son trajet et se fassent tuer.” Le disque possède la mobilité des premiers xoana, contrôlable et indocile.
“A l’égal de créer: la notion d’un objet, échappant, qui fait défaut.” Mallarmé in La Musique et les Lettres, t.2, p.68
Les textes utilisent l’aoriste, l’indéfini quand il s’agit de métamorphoses.
“L’aoriste constate un fait dont la durée n’a pas d’intérêt aux yeux du sujet parlant” J.Humbert
Pas de durée, le temps d’un clin d’oeil, non-visible aux yeux humains, insaisissable.
Ces images ne sont pas nécessairement la représentation de la narration. La circulation entre elles, les objets peints et les sculptures forme cette constellation du ciel métaphorique mallarméen.
J’imagine à partir de la Dame de chez Wepler une sorte de dramaturgie du miroitement entre le regard et la vision, concret et abstrait.